A la manière de Flavius Josephus

J'ai remarqué que bien des sujets et personnages historiques semblaient éveiller des débats sur ce quartier, alors je vous propose de le faire ici lorsque pas en lien directe avec la série.

Sudena  (Hier à 19:01)

Je n'ai rien lâché: j'ai seulement précisé mon ressenti car il était plus question alors de la série que d'Histoire ;) ...

A l'inverse je trouve certains tueurs fascinants mais leurs actes détestables (je pense en particulier à Paulin), et ceux que j'admire totalement sont rares (Saint-Just, Napoléon, Bolivar, Sucre, Alexandre, Henri III, Robespierre). je suis plus clair maintenant?..

Sudena  (Hier à 19:02)

Et on a des témoignages sur ces personnages qui permettent d'en dresser un portrait fidèle: je les connais mieux que beaucoup de mes proches je pense (et j'en aime certains d'amour)...

cinto  (Aujourd'hui à 18:22)

@ kalypso:mp vu eu lu. Le grand blond méchant est tout à fait charmant aussi, ...un peu comme Octave, non?

qu'est-ce qu'on a,nous les nanas, à être charmées par les "bad byos"?

@ Sudena.attends, tu me fais peur! Fasciné par Thierry Paulin?tu plaisantes, j'espère!C'est bien le même dont on parle:ce voyou, drogué,violent,exécrable,haïssable,sans aucune dignité,sans panache, qui ne s'attaque qu'à plus faible que lui?

Les tueurs en série ont toujours alimenté nos névroses , pauvres lambdas qui rêvont de gloire(Landru,Jack l'Eventreur etc...) mais il faut bien se garder de les tenir éloignés de notre imagination et de n'en faire que des personnages fictionnels, afin qu'ils ne débordent pas sur notre inconscient.(J'ai fait une thèse là-dessus!!)

Avec ta connaissance pointue de l'Histoire,que penses-tu de l'exécution de Marie Stuart?Te sembles t-elle justifiée,choisie au bon moment ou trop tardive?

Sudena  (Aujourd'hui à 18:59)

Je parle bien de Thierry Paulin le flambard, le fêtard sympathique que j'aurais aimé rencontrer...et qui parallèlement était un tueur en série méthodique, technique et sans sentiment... Il me fascine car, contrairement à ce qu'on a dit, il n'était pas plus toxico qu'un autre et il ne tuait pas pour l'argent: il avait un mépris de la vie dû peut-être au fait qu'il était condamné lui-même et il haïssait les vieilles femmes pour des raisons qui venaient de loin... Je le condamne sans ambages et totalement (j'insiste beaucoup là-dessus) pour ce qu'il a fait, mais le type lui-même _qui, au dire des policiers, parlait avec insensibilité mais sans aucune provocation_ me fascine... Qu'on le veuille ou non, les tueurs en série mettent en évidence notre propre Thanatos et nous permettent de réfléchir sur nous: ce qui me les rend fascinants (pas tous mais certains), c'est qu'ils sont une sorte de miroir en négatif de ce que nous sommes...

J'ai monté l'an dernier la pièce de Koltès "Roberto Zucco": plus que tout, il "pige" le personnage duquel il parle (même si Roberto Succo n'est pas un tueur en série ordinaire je te l'accorde: étant fou, il n'est pas acessible à la justice des hommes) et il nous permet de descendre au plus profond des questions de malveillance et d'innocence (j'ai demandé à mes petites de jouer la scène de l'arrestation comme un viol interrompu à temps)...

Par-rapport à Marie Stuart, je n'ai pas une opinion tranchée... Au niveau politique, sa mort était une nécessité mais est-elle intervenue au bon moment?.. Politiquement oui: Elisabeth a attendu des décennies ce qui a pu faire penser à une faiblesse...et ça l'était en partie: elle ne voulait pas exécuter une princesse de sang... Mais militairement c'était presque trop tôt: l'exécution de Marie Stuart a entrainé l'agression espagnole et l'Armada n'a été vaincue que grâce aux conditions météorologiques: dans l'idéal il eut fallu attendre que la flotte anglaise ait été encore plus forte, mais bon: victoire il y a eu, donc... Mais pourquoi cette question?

cinto  (Aujourd'hui à 21:41)

@Sudena:J'ai posé cette question à propos de Marie stuart tout simplement parce que je viens de lire sa biographie, certes un peu basique,primaire ; alors comme toi, tu as une opinion sur presque tous les personnages historiques, j'ai demandé...

C'est marrant cette question, car ayant visionné dernièrement les deux films à succès sur la grande Elizabeth, je devais resongé à la pièce de Schiller traitant du sujet de la rivalité entre ces deux reines.

Là encore, on voit que l'histoire anglaise, écossaise et même européenne n'a pas gardé le même souvenir de Marie Stuart.

Personnellement je n'ai pas plus étudier la question que ça, mais je pense qu'elle était une sacrée menace pour le règne d'Elizabeth... puis d'un autre côté la reine anglaise a tellement marqué son monde qu'on comprend mal pourquoi elle n'a pas simplement gardé Marie à résidence au lieu de la faire excécuter.

En même temps la France tirait les ficelles pour tenter de la mettre sur le trône d'Ecosse pour reprendre l'ascendent sur le royaume anglais. Personnellement j'ai developpé une admiration pour les deux reines, autant l'héroine Start chez Schiller et Elizabeth marquand son temps.

Eh une minute! je n'ai pas d'opinion sur tous les personnages historiques, loin s'en faut... D'ailleurs je n'en ai pas de marie Stuart étant donné...qu'elle n'a jamais été vraiment reine. J'ai d'ailleurs parlé du point de vue du règne d'Elisabeth, pas de Marie Stuart...

Une place elle aurait certainement pu en avoir une plus importante mais la France était alors aux prises avec les guerres de religion. D'ailleurs, la coïncidence _mais en est-ce vraiment une?.._ fait qu'elle ait été exécutée au moment où la guerre civile quasi-déclarée entre Henri III et Henri de Guise prenait le tour irrémédiable qui a conduit on sait bien où...

Dites, ça vous tenterait que je mette un extrait de ma pièce sur Thermidor et que ce faisant je vous parle de mon ressenti sur Saint-Just (un monologue inventé lors de son dernier matin)?

Théa: heu... c'est qui flavius josephus?^^

sudena: pourquoi pas mais sous quelle forme? un one shot?

Un monologue (assez court) que je lui ai mis dans la bouche, car à part une phrase historique on ne sait pas ce qu'il pensait ce matin-là (il s'était tu la veille à la Convention et avait pourtant le soir été partisan de l'insurrction)...

Quelle bonne idée, Théa, d'avoir crée ce sujet car je vais avoir bien des questions sur les personnages historiques que je connais, mais pas assez sans doute (en tous cas, pas comme Marie-Antoinette et Napoléon!) et dont Sudena viendra nous donner queqlues explications avec sa science historique que j'admire. Ouf!je m'en suis sortie avec cette phrase à rallonge!!!

Quelle bonne idée, Sudena,de nous faire découvrir les pensées de saint-just , dans ta tête!

Quelle bonne idée ,kalypso, de demander:qui est flavius Josephus?Et le "one shot", ça m'a fait trop pensé à qui tu sais...J'en suis encore toute retournée (si j'ose dire!!)

Voici donc la première scène de mon dernier acte: si vous en voulez plus ou avez des explications à me demander, je suis à votre disposition...

(Matin; antichambre du Comité de Salut Public; sur le mur face au public, au centre, est accrochée la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1793; Saint-Just est sur scène, dos au public, regardant fixement le tableau; un temps)

Saint-Just (se retournant, aux gendarmes hors-scène): C'est pourtant nous qui avons fait tout ça!.. (il se retourne vers le tableau) "Le bonheur est une idée nouvelle en Europe" ais-je dit il y a à peine quelques mois. Et elle est manifestement une idée encore trop neuve pour la France... Combien d'armées se sont levées contre elle?.. Combien d'hommes pourtant vertueux n'y ont pas cru?.. Est-ce toi, Révolution, qui après avoir bu le sang de tes ennemis exige maintenant celui de tes amis? Reconnais-tu les tiens au sang souillant leurs mains? Ou sont-ce tes ennemis qui te tuent lentement?.. (un temps) Je t'ai tout donné, Révolution! En toi je voyais la lumière qui guide les hommes vers le bonheur. Je voyais des générations nouvelles éduquées à défendre la liberté, voire à en gagner encore d'autres auxquelles nous n'aurions pas pensé... Je voyais une société où la naissance ne signifiait rien et où le bien-être de tous prévalait sur les ambitions de chacun... Je voyais un monde où les femmes étaient libres et adorées: égales aux hommes tant dans leurs actes que dans leurs paroles... C'est comme ça que je te voyais, Révolution. Et maintenant que je vais mourir je me dis que tu n'as jamais été autant en danger qu'aujourd'hui; et je ne peux même pas lever le doigt pour te défendre!.. Mais qu'a-t-il donc pris à Billaud et à Collot??! Ils sont pourtant tout autant que moi attachés à la République!.. (un petit temps) Fouché... C'est Fouché qui a réussi à les entrainer là-dedans comme il va réussir à faire main basse sur le club des Jacobins... (un temps; s'emportant) Et qu'est ce qu'il me reste maintenant, Révolution?! Je vais être exécuté non-pas comme un homme mais comme un hors-la-loi! Ils ont jeté Couthon dans l'escalier: est-ce digne de toi?!! Et Maximilien qui se fait tirer dessus, et Augustin qui se jette par la fenêtre: pourquoi leur réserver une telle agonie?! Pourquoi n'as-tu pas accepté leur mort? Ta veuve a-t-elle tant besoin du sang des Robespierre?! Et pourquoi m'as-tu pris Philippe?! Son sang était-il trop pur pour être mélangé au mien? Sa tête était-elle trop belle pour s'unir à la mienne?.. (il pleure; un petit temps; il se reprend et regarde fixement le tableau) C'est ça Révolution... C'est cette Déclaration qui te maintiendra en vie dans les heurs les plus sombres... Car tu auras certainement des protecteurs qui te protègeront mieux que nous ne t'avons protégée, et des amants qui sauront t'aimer mieux que nous ne t'avons aimée; mais tes ennemis pourront toujours vaincre tes protecteurs et souiller tes amants. En-revanche ils ne pourront rien devant la toute-puissance de tes principes qui guideront les peuples à-travers les générations... (un petit temps) Et en cela, Révolution, nos vies auront servi à quelque-chose...

J'aurais dû être plus précis sur Marie Stuart: je n'ai jamais dit (je ne suis pas encore totalement abruti...) qu'elle n'avait pas été reine: mais comme elle n'a de facto jamais exercé le pouvoir, je suis un peu bloqué pour dire ce que je pense d'elle politiquement parlant... ;)

Sudena, trop d'idéal social chez Saint Just et à la fois beaucoup de sang froid politique et de recul  sur le devenir de la Révolution.Pas d'amerturme et d'aigreur, j'espère...

Je sais bien que tu n'es pas abruti et je crois qu'ici, personne n'en doute.

Si je clos le sujet sur Marie Stuart,j'aurais certainement d'autres personnages dont on pourrait débattre.Quant à moi, je pense que politiquement l'éxécution semblait inévitable et n'a fait que renforcer le pouvoir d'Elisabeth, au moment où il le fallait.Mais quand même, pauvre Reine...(j'ai tendance à m'apitoyer sur le sort des reines...)

Pour m'informer sur l'Archange de la Révolution, j'ai d'abord lu ses notes: sa phrase sur les femmes qui "chez les peuples vraiment libres sont libres et adorées" est parfaitement authentique: il l'a écrite dans un manuscrit inachevé sur les institutions républicaines; ainsi que sa tout première sur la DDHC (c'est la seule dont on est sûrs qu'il l'ait prononcée ce matin-là)... Quand au devenir de la Révolution, le discours du 9 thermidor (que j'ai lu intégralement, comme tous ses autres) est surprenant quand à sa modération et sa lucidité... Après le fait qu'il ait prévenu le devenir est une interprétation basée sur son attitude ce jour-là, certainement grandiloquente, et peut-être illégitime. Mais pourquoi s'est-il tu ce 9 thermidor? Personne ne le sait... En-revanche, on est sûr qu'il a pleuré ce matin-là: c'est sa seule manifestation d'émotion connue...

Aucune aigreur, je te rassure ;) , mais j'ai tenu à mettre ces sources afin que tu n'aies pas le sentiment que j'aie angélisé sans raison ce personnage dont il ne faut pas oublier qu'il est le vrai père spirituel de la Constitution de l'an I, l'une des principales flammes pesantes dans l'abolition de l'esclavage...et qu'il était défavorable à la Grande Terreur... Je sais que tu as beaucoup de pitié pour Antoinette, mais Saint-just n'était pour rien dans sa chute...et a été victime lui-aussi de la Terreur, au moment où il voulait (comme Robespierre) l'arrêter (de cela nous sommes certains, bien qu'on ait fait longtemps croire le contraire)...

Je mets la suite de l'acte V: ça semblera peut-être un peu plus clair :) ...

Comité de Salut Public; une table sur laquelle est allongé Maximilien, le visage entouré d'un pansement grossier, souillé de sang; des gendarmes montent la garde; Couthon est assis sur une chaise, complètement groggy; Fleuriot-Lescot est deboût, les mains liées derrière le dos. Pendant toute la scène Maximilien s'essuie la joue droite avec des feuilles de papier et respire difficilement. Saint-Just entre, escorté par deux gendarmes; son regard va lentement de Maximilien à Couthon; un temps; il fait visiblement un effort pour se dominer.
Saint-Just (aux gendarmes l'escortant): Citoyens, auriez-vous la bonté d'aller me chercher trois verres d'eau s'il vous plait? il regarde Fleuriot-Lescot Ou quatre _excuse-moi_?..
Fleuriot-Lescot: Non merci, je n'ai pas soif.
un gendarme s'incline légèrement et sort; un temps
Maximilien (au gendarme le surveillant): Monsieur, pouvez-vous s'il vous plait me donner de l'encre et une plume?
le gendarme: Quoi? Ecrire? Et à qui donc?!. Vas-tu écrir à ton "Etre Suprême"?..
un petit temps
Maximilien: Dans ce cas permettez que je vous donne quelque-chose... élevant très légèrement la voix A vous tous!..
les gendarmes se tournent vers lui; Saint-Just et Fleuriot-Lescot échangent un regard
Maximilien: Je vous donne ma mémoire. Et vous la conserverez. Et elle vous sera précieuse...
il s'arrête, manifestement épuisé, et recommence à s'essuyer la joue; le gendarme qui était sorti revient, porteur de deux verres d'eau qu'il tend à Saint-Just
Saint-Just: Merci.
il les prend
Fleuriot-Lescot (à part, à Saint-Just): Tu n'en avais pas demandé trois?..
Saint-Just: Qu'importe...
il va vers Couthon et lui donne un verre que ce-dernier boit mécaniquement; puis il va vers Maximilien et le fait boire; il reprend ensuite les verres et les redonne au gendarme qui ressort; un temps; noir.

rue ensoleillée de Paris; Eléonore et Elisabeth sont sur scène. Eléonore semble hébétée et Elisabeth la tient par l'épaule

Elisabeth: Allons Eléonore: ça ne sert à rien de tourner en rond. Il faut penser à l'avenir maintenant.
Eléonore: A l'avenir? Y a-t-il un avenir quand tous ceux que nous avons aimé meurent?..
Elisabeth: Ils mourront comme ils ont toujours vécu: droits et courageux. Et ils retrouveront Philippe...
elle s'interromp et baisse les yeux
Eléonore: L'honneur...
Elisabeth: Quoi?
Eléonore (la prenant par les épaules): Il nous reste l'honneur ma chérie: constituons-nous prisonnières et partageons leur sort!..
Elisabeth: Tu as perdu la raison?
Eléonore: Elisabeth, nous n'allons pas nous terrer en attendant qu'ils viennent nous chercher! Et que pourrions-nous faire de plus beau, aujourd'hui, que de nous rendre nous-mêmes à l'échaffaud?
Elisabeth: Vivre.
un temps; Elisabeth regarde sa soeur dans les yeux
Elisabeth: C'est précisément parce qu'ils vont mourir que nous devons, nous, vivre: afin que leur mémoire ne meure pas en même temps qu'eux. C'est ce que Philippe m'a demandé et je sais que Maxime aurait dit la même chose!
Eléonore: Mais...
Elisabeth (interrompant): Eléonore, tu aimes Maxime oui ou non? un petit temps Alors crois-moi: survis-lui! un petit temps C'est l'apanage des hommes que d'avoir le courage de mourir: ayons, nous, celui de vivre! C'est peut-être moins glorieux, c'est certainement plus utile...
entrent Jacques et Gilbert
Gilbert: Tiens! Salut citoyennes!
Elisabeth: Salut citoyens! Vous m'avez l'air bien pressés...
Jacques: On l'est... Si vous voulez un conseil, soyez dans les parages ce soir...
Elisabeth: Pourquoi? Que va-t-il se passer?
Jacques: Le rétablissement de la vertu!
Eléonore: Comment??? Mais je croyais que la Convention avait...
Gilbert (interrompant): Oh la Convention "a", c'est sûr. Seulement la Convention n'est pas la rue...
Elisabeth: Que voulez-vous dire?
Jacques: Ce soir, à la tombée de la nuit, le tocsin sonnera à nouveau; et les patriotes, qui auront pu se reposer le jour, libèreront, comme hier soir, Robespierre, Saint-Just, Couthon, et tous les autres. Sauf que cette fois-ci on ne fera plus d'erreur: on ira directement à la Convention embrocher ces traitres...
Eléonore: Mais si Robespierre et Saint-Just sont décapités avant...
Gilbert (interrompant): C'est impossible.
Elisabeth: Mais pourquoi?
un petit temps; Jacques et Gilbert échangent un sourire
Jacques: Parce que pour exécuter, comme ils en ont l'intention, nos amis comme des hors-la-loi _on est bien placés pour le savoir_ il faut qu'ils soient déclarés hors-la-loi par au moins deux officiers municipaux.
Elisabeth: Et?..
Gilbert: Et il se trouve qu'ils ont déclaré hors-la-loi TOUS les officiers municipaux...
Eléonore: Ce n'est pas possible!?.
Gilbert: Si! Ils sont donc obligés de les juger légalement! Et il leur faudra quelques jours pour tout préparer...
Elisabeth: Mais s'ils décident de passer au-dessus des lois?..
Jacques: Ils n'oseront pas. D'abord parce que, là, ce serait vraiment un coup d'Etat, et ensuite parce qu'on a un atout de poids au Tribunal Révolutionnaire: le citoyen accusateur public Fouquier-Tinville...
Eléonore: Bon Dieu, c'est vrai! Mais alors...
Gilbert (interrompant): On vous l'a dit: ils sont fait comme des rats.
noir

antichambre du Tribunal Révolutionnaire; Fouquier-Tinville est sur scène, attendant visiblement et tenant d'encombrants dossiers; un petit temps; Collot entre d'un pas rapide

Collot (à brûle-pourpoint): Alors Fouquier, que signifie cette plaisanterie?! En quoi les "dispositions actuelles de la loi" peuvent-elles t'empêcher de faire le travail que la nation t'a assigné?
Fouquier-Tinville: Comme je te l'ai déja signifié par écrit citoyen la Convention ne peut absolument pas procéder à une mise hors-la-loi sans l'aval et la signature d'au moins...
Collot (interrompant): Je sais lire. Ce que je te demande c'est depuis quand des détails de procédure t'empêchent de faire ton travail et de sauver la nation?!.
Fouquier-Tinville: "Sauver la nation"? C'est de Robespierre et Saint-Just que tu parles...
Collot: Et alors? Ton rôle est de condamner TOUS les contre-révolutionnaires, sans te soucier de leur nom.
Fouquier-Tinville: Et le sont-ils?
Collot: Pardon?
Fouquier-Tinville: Dans tout ce que vous m'avez donné je ne vois strictement aucune preuve de ce que tu affirmes...
Collot: Et depuis quand cela te préoccuppe-t-il?.. Tu as bien fait condamner Danton, Hébert, Desmoulins, Fabre, Chaumette...
Fouquier-Tinville (interrompant): Comme j'ai fait acquitter Marat, Miranda, et tous ceux qui avaient fourni une preuve de leur patriotisme républicain! J'ai même fait acquitter un ci-devant, figure-toi!, qui avait combattu fidèlement dans nos armées _un certain d'Avout si ma mémoire est bonne_!.. Et tous ceux qui ont tenu un rôle important _qu'ils aient été acquittés ou condamnés_ ont eu droit à un procès et à un jugement populaire...
Collot: Nous ne pouvons pas nous permettre ça Fouquier: le peuple est enragé et la patrie est en danger! Si nous hésitons encore quelques heures les sans-culotte nous rejoueront le même morceau qu'hier, mais en pire!..
Fouquier-Tinville: Je suis un magistrat, Collot! Pas un bourreau! Et il me semble qu tu confonds les intérêts de la patrie avec les tiens!.. Qui te dit, après tout, que Saint-Just voulait ta peau? Et qu'il ne voulait pas simplement...
Collot (interrompant): Bon ça suffit! Citoyen tu vas obéir aux ordres de la Convention dont je suis ici le représentant, autrement tu seras arrêté et condamné pour insubordination au gouvernement, ce qui est un crime de haute trahison! Est-ce clair?!!
un petit temps; Fouquier-Tinville baisse les yeux
Fouquier-Tinville: C'est clair.
Collot: Bien. Bonne journée citoyen.
il va pour sortir
Fouquier-Tinville: Collot! Collot se retourne Ce soir, fais bien attention de na pas regarder la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen: tu risquerais de t'y brûler les yeux...

Conciergerie; Maximilien, Augustin, Couthon, Saint-Just et Fleuriot-Lescot sont sur scène; Maximilien est toujours bandé et respire très difficilement; Couthon et Augustin sont assis, complètement groggys, pâles comme des cadavres; tous ont les mains liées derrière le dos et portent la chemise blanche des condamnés à mort qui laisse nu le cou et découvre largement une épaule; celle de Maximilien est rougie du sang coulant de sa joue; un petit temps.

Fleuriot-Lescot (plus à Saint-Just qu'aux autres): Hanriot a été condamné à mort lui aussi: il fera partie de la cohorte des patriotes exemplaires qui nous accompagnera. Lui et plus d'une vingtaine d'autres...

Saint-Just: Aujourd'hui...

Fleuriot-Lescot: Comment?

Saint-Just: Aujourd'hui seulement citoyen: ils seront des centaines _peut-être des milliers_ d'autres qui mourront dans les jours et les décades à-venir simplement pour avoir cru aux mêmes idées que nous...

Maximilien: Saint-Just... (Saint-Just se retourne) Pardonne-moi de t'avoir entrainé avec moi dans ma défaite... Tu aurais pu _et bien plus légitimement que Billaud ou que Carnot par exemple_ te désolidariser de moi depuis longtemps déja...

Saint-Just: J'ai fait mon choix Maxime. Ca a été difficile mais j'ai fait celui-là: et je ne le regrette pas.

Maximilien sourit; un temps; Saint-Just va près d'Augustin.

Saint-Just: Tu tiendras le coup Augustin?..

Augustin (semblant se réveiller): Hein?.. (il lève les yeux) C'est toi Saint-Just? (un petit temps) Que veux-tu savoir?

Saint-Just: Rien. Repose-toi: j'ai ma réponse.

Il se tourne vers Couthon qui lui rend son regard.

Couthon: On tiendra Louis! On sera vivants jusque sur la bascule!

Bruit de verrou; deux assistants du bourreau entrent, l'un d'eux tenant une paire de ciseaux; ils vont d'un condamné à l'autre, coupant les cheveux qui descendent sur les nuques, puis ressortent; noir.






Antichambre du Comité de Salut Public; la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1793 est accrochée sur le mur face au public; Collot, Billaud, Tallien et Carnot sont sur scène, les yeux baissés; Fouché entre; à son entrée tous lèvent les yeux.

Fouché: Le peuple ne bougera pas: ceux qui auraient voulu tenter une action n'auraient pas pu le faire avant ce soir. En-revanche aucun pauvre n'assistera à l'exécution... Les Duplay ont été arrêtés et Barras a commencé la traque des robespierristes dans tout Paris.

Tallien: La foule?

Fouché: Des bourgeois. Assez nombreuse mais très passive...

Carnot: Pas de manifestations de joie? Ou de cris de haine?

Fouché: Quelques uns, si. Mais très négligeables si on tient compte de la longueur du trajet, sans compter, je vous l'ai dit, qu'il n'y a pas un seul sans-culotte.

Carnot: Il faudra veiller à dire que l'ambiance était à la fête et que les pauvres gens dansaient de joie sous l'échaffaud.

Fouché: Certes. Mais que prévois-tu de faire dans les armées?

Carnot: Les armées auront bien assez de pain sur la planche avec les prussiens et les autrichiens qui ne vont pas tarder à repasser à l'attaque, nottemment à l'est...

Billaud: Que veux-tu dire Carnot? Que Fleurus n'était pas décisive?..

Carnot: Fleurus est une grande victoire. Mais qui n'a fait que retarder l'échéance: nous n'avons aucune paix en vue et nous sommes toujours menacés, plus ou moins gravement, sur trois fronts...

Billaud (effaré): Tu veux dire que Robespierre avait raison?! Que la victoire est aussi précaire que ce qu'il a dit à la Convention?!.

Carnot: Oui.

Un petit temps.

Billaud: Je te vomis!

Il sort d'un pas rapide; un temps.

Collot: Qu'avons-nous fait citoyens? Avez-vous simplement une idée de ce que coûtera cette journée à la France?..

Tallien: Il valait mieux que cela tombe sur eux plutôt que sur nous...

Fouché: Et puis nous pouvons dormir sur nos deux oreilles citoyens: avec moi aux manoeuvres désormais aucune conspiration n'existera plus sans que le gouvernement légal ne le sache...

Un temps; Collot regarde le Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen.

Collot: Fouquier m'avait bien prévenu...

Il détourne le regard.

Tallien (compréhensif): Tu verras Collot: ça ira mieux quand le calme sera revenu. (confidentiel) On fera en sorte que personne d'entre nous ne soit inquiété...

Collot: Alors on revient aux privilèges? La nuit du 4 août n'a donc jamais existé?!! (un temps) Je suis un misérable!

Il sort; noir.






Place de la Révolution; fin d'après-midi ensoleillée; scène nue; quatre gendarmes déterminent un espace dans lequel se trouvent Maximilien, Augustin, Couthon, Saint-Just et Fleuriot-Lescot, les mains liées derrière le dos; Maximilien a toujours le visage bandé; durant toute la scène les assistants du bourreau n'entrent et ne sortent que d'un endroit.

Fleuriot-Lescot (confidentiel, à Saint-Just): Fouquier avait reçu des ordres, c'est sûr: sinon il n'aurait jamais agi comme il a fait...

Saint-Just: Il n'en a pas pour longtemps lui non-plus: dès qu'ils en auront fini avec nos partisans ils s'en prendront à tous ceux qui auront soutenu la Terreur. Et les plus désintéressés seront les premiers condamnés...

Deux assistants du bourreau entrent et ressortent en portant Couthon, quasiment sans connaissance; les autres, excepté Augustin, regardent l'endroit où ils sont repartis sans détourner les yeux.

Fleuriot-Lescot (à Saint-Just): Dis-moi... Sincèrement, que penses-tu de ça?..

Il désigne d'un signe de tête l'échaffaud hors-scène.

Saint-Just: Pas grand-chose. Ca devait arriver de toutes façons...

On entend le bruit du couperet qui tombe; les assistants du bourreau reviennent et emportent Augustin, inconscient.

Saint-Just: Mais si, en fait... Je ne pense même qu'à lui depuis plusieurs heures...

Fleuriot-Lescot: De qui parles-tu?

Saint-Just ne répond pas; on entend le couperet qui tombe; les assistants du bourreau reviennent et désignent Saint-Just.

Saint-Just: Philippe...

Il sort encadé par les assistants du bourreau, impassible; après un petit temps on entend le couperet tomber; les assistants du bourreau reviennent, semblent hésiter, puis désignent Maximilien; Maximilien échange un sourire avec Fleuriot-Lescot et va pour les suivre; ils essaient de l'aider à marcher mais il se débat et ils renoncent rapidement; ils sortent.

Fleuriot-Lescot (à part): Vive la France!

On entend Maximilien hurler de douleur; son bandage ensanglanté est rejeté sur scène; Fleuriot-Lescot ferme les yeux mais les rouvre très rapidement.

Fleuriot-Lescot (à part): Dire qu'on a empêché Capet de parler... Courage Maximilien!.. (on entend le couperet tomber) Vive la République!

Un petit temps.

Fleuriot-Lescot (à part, ironique): Pas d'ambiance aujourd'hui, tu ne trouves pas Charlot?.. (les assistants du bourreau reviennent le chercher; il les salue en souriant et ils sortent; du dehors) Vive la Révolution!

On entend le couperet tomber; noir final.

et ben! *épuisée de sa lecture* je ne critiquerais pas le fond, je n'en suis pas capable... enfin, capable, compétente^^. par contre, tu avais mit sur un com' précédent que certain de tes personnages historique, tu les aimais d'amour... heu... Ah oui, là, oui, oui!! pour avoir passer autant de temps a lire, digérer, analyser et imagnier ça, puis a le retranscrire c'est que, oui, tu les aimes, c'est clair!

comme d'habitude, ton style est impécable (sauf tes tiret 8 _ au lieu de 6 - mdr comme te la déjà dis Gwenetsi, lol) , et bien que ce ne soit que le script d'une pièce de théatre, je peux te dire que j'en frissonnais a chaque couperet qui tombait!

chapeau bas, sud' :)

*se couchera moins bête demain matin*

Ce n'est ici que l'acte V: pas le plus long.. Le couperet pénible à supporter? Merci :) . Je ne te dis pas alors à quel point ça a été de l'écrire... Mais le plus affreux a été le premier mort (Philippe Le Bas) à la fin de l'acte IV: c'est avec ça qu'on mesure la toute-puissance qu'on a d'être auteur... Mais si on peut faire revivre certains êtres qu'on ame, on a aussi le pouvoir de les tuer: et c'est nous qui tuons...

@ Sudena:

Wahou!la dernière scène m'a donnée des frissons!!terrible!On y est, quoi...

En ce qui concerne l'Histoire, je ne reviendrai pas dessus, tu en connais certainement plus que moi.C'est très bien écrit.quel talent!comment t'es venu cette idée, d'écrire pour le théâtre.

Dans la série que je vois (QAF pur ne pas la citer, clin d'oeil à kalypso^^),un personnage (Ben) est écrivain et à un moment il dit à Brian que la création amène à vivre une intensité peut-être plus forte que celle d'un orgasme.Ok, ils sont branchés Q mais je crois que c'est peut-être vrai.Tu sembles en tous cas drôlement t'éclater là-dedans...

C'est un peu ce que tu dis quand tu dis posséder un pouvoir extrème vis à vis des personnages:c'est certainement très jouissif.Posséder le droit de vie et de mort sur du virtuel permet peut-être d'assouvir et de combler le côté sombre qui est en nous, non?

Ecrire du théâtre est naturel: je suis de ce monde, ayant déjà été prof et toujours plus ou moins lié à ça (jeu ou autre)... Après je voulais écrire sur la Révolution, et en particulier sur Robespierre et Saint-Just qui sont généralement détestés (je veux à mon niveau leur rendre une certaine justice)... Et au fait, si tu avais des infos sur les caractères de certains maréchaux d'Empire, je suis preneur ;) ...

Le pouvoir de l'écrivain est effectivement total mais à titre personnel il me fait peur et ne permet que partiellement d'évacuer le côté sombre à moins d'être vraiment sadique... C'est génial de les fair revivre, de les laisser un peu nous surprendre,mais les tuer est un crève-coeur terrible et terrifiant... 

Joe Dassin disait quelque-chose de très intéressant: "Les artistes ratent généralement leurs histoires d'amour car ils se figurent qu'il est plus intense d'aimer un public que de dire "je t'aime" dans une chambre..." Je suis d'accord avec cette phrase et je peux dire que le public, les lecteurs, sont VRAIMENT de la jouissance (je n'ai à titre personnel jamais eu la moindre histoire d'amour).

ohh... pas d'histoire d'amour? tiens? pourquoi je suis a peine étonnée ^^ Pauvre petit chat *donne un choco-St juste à sudena en lui ébouriffant les cheveux* ça va venir, ne t'en fait pas

En tout cas, je te rejoins sur ce point, moi, je n'ai pas ton talent ( --') mais qu'est ce que j'ai du plaisir a écrire mes fics! Tu devrais essayer cinto, franchement! de prendre tes perso préférés et faire d'eux tout ce que tu veux, les faire rire ou pleurer, réfléchir a ce qu'ils sont et d'où ils viennent, qu'est ce qui est vraiment important pour eux... c'est, oui, comme dit sud' très jouissif: on se met dans leur peau, ils vivent avec nous et partage notre quotidien... c'est... argh! top! ^^

*a un doute*

*part voir s'il y a des EV sur QaF*

Arghh! namého!! tu as tué Brian cinto?!!! et la suite? tu n'as pas fait de suite?!

@sudena et @kalypso.

1)Tu as déjà été prof, sudena?Mais tu as quel âge?

*clin d'oeil à kaly*

Tu vois, Sudena,c'est un peu ce que je reproche à l'Histoire.Je sais, c'est ta passion, comme c'est un de mes plaisirs, mais ce que je veux dire, c'est que quelque part,l'Histoire nous enferme aussi dans ce qu'elle a de passé, d'archaïque et peut nous amener à nous déconnecter du monde extérieur, du monde présent et de ses joies, à force de vivre les vies des autres...Toi, sors, amuses-toi, fais des rencontres,et tâches d'aimer,d'apprécier les personnes, entoures-toi d'amis, souris et l'amour te sourira...

OMG, qu'est-ce que je raconte, comme lieux communs! bon, ça peut arriver, c'est vrai.

2)En ce qui concerne les créations qu'elles soient littéraires ou pas,je comprends l'extraordainaire plaisir à créer , à manipuler les personnages, tels des marionnettes (enfin presque!)Donc Ben avait raison.Ce qui provoque une grosse crise de jalousie de Brian envers Michaël et Justin qui se rapprochent grâce à cette excitation de la création.(nouveau clin d'oeil à Kalypso!)

Quant à moi,l'EV est une première(pardon pour les fautes de frappe); je ne sais si je referai l'expérience, compte tenu de mes dispositions espistolières et je me suis longtemps refusé à toucher (quelquefois j'aurais bien aimé!!)à mes personnages favoris, tellement leurs peintures de caractères est bien faites.

3)Oui, Brian est mort parce que j'ai pensé que Justin aurait pu mourir dans l'explosion du Babylon et c'était impossible qu'ils soient séparés.(mp envoyé.)

J'ai été prof de théâtre pendant deux ans, j'ai vingt deux ans et je n'ai pas de diplôme. C'est juste l'expérience dans ce théâtre qui m'a donné une légitimité...et les résultats qui ont beaucoup satisfait. J'ai des amis à la vie à la mort mais j'en ai une conception particulière de l'amitié... Je n'ai aucun autre atout dans la vie que mon cerveau...et deux ou trois verres de monaco ;) ... Je ne m'aime pas moi-même et mon surhomme s'appelle Enjolras: j'avoue que je rêve d'une vie brève et d'une mort "glorieuse", aussi je m'intéresse de près à la politique et suis l'actualité de très près: c'est via celle-là que je regarde l'Histoire, afin d'essayer d'en tirer les leçons. mais pour ce faire il faut la connaître vraiment, afin qu'elle ne soit pas ce fameux "mensonge que personne ne conteste" cher à Napoléon...